mardi 7 avril 2015

N’ayez crainte, M. Gould est parmi nous

Le billet suivant est mon Mardi en Musique du 7 avril 2015.

Ce billet reprend le Montage # 50 (Commentaire original: 
http://itywltmt.blogspot.ca/2012/04/montage-50-this-day-in-music-history.html)


pcast050 Playlist


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N’ayez crainte, M. Gould est parmi nous. Il sera des nôtres dans un moment.


Comme vous le savez, ce n’est pas mon habitude d’offrir un commentaire lors de nos concerts […]. Toutefois, nous faisons face ici à une situation particulière qui mérite que j’ajoute un petit mot.

Vous allez entendre sous peu une prestation, si vous me permettez, quelque peu non-orthodoxe du concerto en ré mineur de Brahms, une prestation clairement différente de celles que j’ai entendues, ou meme revé d’entendre. Avec ses tempi excessifs et ses departs frequents des indications du compositeur, je dois admettre que je ne suis pas tout à fait d’accord avec ce que M. Gould propose. Ceci soulève la question, pourquoi alors diriger ce concerto?

Je le dirige parce que M. Gould est une artiste à ce point valide et sérieux que je ne peux qu’accepter son approche de bonne foi, et sa conception est à ce point intéressante que je crois qu’elle mérite votre audition.

La question fondamentale reste toutefois: qui est le patron dans un concerto – le soliste, ou le chef? La réponse est, simplement, parfois l’un, parfois l’autre. Plus souvent qu’autrement, les partis en arrivent à un consensus, que ce soit par nécessité ou par discussion. Je n’ai, de mémoire, eu à faire face à untel dilemme qu’une seule fois en carrière, et si je ne m’abuse, ce fut lors d’une autre collaboration avec M. Gould!

Mais cette fois-ci, le fosse qui nous sépare est si large, que je me suis senti oblige d’offrir cet avertissement. Alors, sans vouloir radoter, alors pourquoi diriger ce concerto moi-même quand j’aurais pu demander à un de mes assistants de le faire, ou même trouver un remplaçant? Parce que je suis fasciné par le processus, et que j’aime l’idée d’attaquer différemment une pièce dont l’execution reste largement parmi les sentiers battus. De plus, il y a des moments où M. Gould révèle des passages d’une fraîcheur et d’une conviction étonnantes. Et, bien sûr, parce que j’ai ici l’occasion d’apprendre quelque chose de nouveau de la part d’un artiste qui pense constamment, ce que Mitropoulos appelle "l’élément sportif", un facteur de curiosité et d’aventure et, croyez-moi, ce fut toute une aventure! C’est dans cet esprit que je vous invite à absorber la performance qui suit.


- Leonard Bernstein, le 6 avril 1962



C'est avec cette introduction que Leonard Bernstein, directeur artisitque de la Philharmonique de New-York, introduit son soliste de la soirée Glenn Gould dans une prrestation du premier concerto pour piano de Johannes Brahms.

En prévision du concert, M. Gould entra en contact avec son collaborateur de longue date, afin de l'informer qu'il avait revu la partition du concerto en détail, et avait fait des "découvertes" qu'il comptait exploiter lors de leur concert. Il n'existe aucun compte-rendu détaillé des répétitions, mais elles dûrent être fort ardues car M. Bernstein crut bon préparer un "Plan B" pour le concert de ce soir-là (la première symphonie du même compositeur), au cas ou le soliste de désisterait - chose que M. Gould a fait auparavant à d'autres occasions...

Toutefois, le soliste était au rendez-vous, et sait suite à cette annonce qu'il aura l'occasion d'exécuter l'oeuvre telle qu'il l'eût imaginée.

A vous de décider si M. Gould a remporté son pari.

La première moitié du programme de ce soir-là mettait en scène deux pièces du compositeur danois Carl Nielsen: l'ouverture à son opéra Maskarade, et sa cinquième symphonie.

Pour ceux que ça intéresse, je vous propose un hyperlien à une prestation plus "standard" du même concerto par M. Gould, avec l'orchestre symphonique de Winnipeg, quelques années auparavant.

Bonne écoute!

Carl NIELSEN (1865-1931)
Ouverture pour Maskarade, FS39
DR Radiosymfoniorkestret (Danemark)
Sergiu Celibidache, direction

Symphonie no.5, Op.50
DR Radiosymfoniorkestret
Herbert Blomstedt, direction

Johannes BRAHMS (1833-1897)
Concerto pour piano no.1 en ré mineur, Op.15
Glenn Gould, piano
New-York Philharmonic
Leonard Bernstein, direction et introduction parlée




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